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Disparition de la 2G/3G : attention à l’effet rebond

La disparition des réseaux 2G/3G semble une évolution naturelle, mais pose pourtant des questions d'impact social et d'empreinte carbone

Extinction des réseaux mobiles 2G et 3G : attention à l’effet rebond et à l’impact social


Aujourd’hui, trois des plus gros opérateurs de réseaux mobiles en France métropolitaine ont enclenché l’extinction de leurs réseaux 2G/3G. Sur le papier, la décision semble logique : la grande majorité des terminaux numériques vendus utilisent la technologie 4G/5G, et la disparition de ces anciens réseaux permettrait une économie de la consommation électrique. Néanmoins, le rapport de l'Arcep (Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse) concernant cette question, publié ce mois-ci, apporte une perspective nuancée en expliquant la nécessité d'adopter une approche progressive et réfléchie pour cette transition afin de prévenir un effet rebond.  

Une remise en question des bénéfices écologiques

Malgré leur déclin, les réseaux 2G/3G continuent de contribuer à 21 % à 33 % de la demande totale d'électricité des stations de base. Engager leur extinction serait donc l’occasion de se débarrasser de réseaux énergivores peu usités, et semble dans l’ordre des choses.   

Mais l’Arcep ne s’est pas limité au simple périmètre de la consommation énergétique pour évaluer l’impact carbone de cette migration : par le biais d’une ACV (Analyse du Cycle de Vie), elle a également pris en compte l’obsolescence de millions de terminaux et objets connectés dépendant des réseaux 2G et 3G. Cela concerne notamment les téléphones mobiles anciens rendus inutilisables, et demandant donc à être remplacés : or, la production d’équipements numériques est responsable de la plus grande partie de l’empreinte environnemental du secteur.  

Il convient également de prendre en considération les avertissements d'EcoInfo, le groupement de service du CNRS axé sur la responsabilité numérique. L'allocation des bandes de fréquences de la 2G et de la 3G aux technologies 4G ou 5G pourrait entraîner une augmentation de la consommation d'énergie en raison de l'accroissement du trafic généré et de la nécessité d'installer de nouveaux équipements. En d'autres termes, à mesure que les capacités du réseau augmentent, cela peut également entraîner une augmentation de l'activité numérique et ainsi accroître l'empreinte carbone.  

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Obsolescence d’équipements numériques ancienne génération :  l’impact social sous silence

Il est difficile d’estimer avec précision combien de personnes utilisent encore aujourd’hui d’anciens modèles de téléphone portable, mais ils seraient selon les principaux opérateurs plusieurs centaines de milliers. Accessibles par leur petit prix, faciles d’utilisation, très grande autonomie, fonctionnalités limitées aux essentiels... La fin de la 2G/3G revient à priver les personnes les plus éloignées de la technologie, en situation de fracture numérique ou d’illectronisme, d’outils du quotidien qui répondent à leurs besoins.   

De plus, la 2G dont ils dépendent dispose d’une large couverture sur le territoire. Mettre à l’arrêt ce réseau (plus sobre énergétiquement que la 3G) risque de créer de nouvelles zones blanches, au grand dam des populations rurales. Au-delà de la couverture réseau, la 2G est encore utilisée pour de nombreux objets et dispositifs connectés : ascenseur, GPS, défibrillateur mais aussi système de téléassistance en cas de chute à domicile. Cela pose des questions quant aux oubliés des bascules technologiques, qui s’avèrent bien souvent les personnes les plus vulnérables au sein de nos sociétés. 

Un numérique en constante mutation, mais à quel prix pour l'environnement et les communautés ? 

Bien que l’Arcep préconise une compensation carbone entre les avantages en termes de consommation électrique et le coût environnemental engendré par le remplacement des appareils numériques compatibles 2G/3G rendus obsolètes, cette évolution questionne une fois de plus sur la manière dont nous pensons et faisons le numérique. La 5G améliore certes notre confort d'utilisation, mais elle engendre une voracité dans la consommation de données avec des répercussions environnementales tangibles, notamment au niveau des data centers. Pour atténuer l'impact environnemental et social du numérique, il est impératif de promouvoir la rétrocompatibilité, de lutter contre l'obsolescence des anciens terminaux, et d'adopter une approche plus responsable et éthique de notre utilisation des technologies.

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