L'avènement de l'intelligence artificielle générative, définie comme un programme informatique capable de créer de nouvelles données à partir de modèles appris, a révolutionné divers domaines. Des logiciels de traduction ou de prise de notes aux algorithmes de recommandation de musiques ou de films, en passant par les assistants virtuels tels que Siri ou Alexa, son influence est omniprésente. Et c’est sans compter la présence de ChatGPT, qui a boulversé le monde en l’espace d’une année.
Mais cette importance croissante suscite de nombreuses préoccupations quant à son impact sur la sobriété numérique. Cette innovation, bien qu'offrant des possibilités d'innovation sans précédent, semble en contradiction avec les efforts visant à promouvoir la sobriété numérique et met en péril les stratégies Green IT des DSI. Et c’est à cette intersection qu’une question se pose : peut-on réellement concilier la démarche numérique responsable et l'intelligence artificielle dans un monde de plus en plus numérisé ?
IA : le progrès à l’ère du numérique
L'intelligence artificielle (IA), notamment sous sa forme générative, émerge aujourd'hui comme un catalyseur incontournable de l'innovation. Au cœur de cette révolution ? Les directeurs, les responsables et les managers, qui se retrouvent confrontés à la nécessité d’adopter et de s’adapter à ces changements pour rester compétitifs. Il faut dire que les capacités de l'IA générative s'étendent à travers une multitude de domaines : que ce soit dans la création artistique, la conception de produits, la résolution de problèmes complexes ou la génération de contenus, cette technologie repousse les limites de ce qui était autrefois considéré comme possible.
L'IA générative offre de nombreux avantages :
- Favorise la créativité en explorant rapidement diverses possibilités
- Génère des solutions à des problèmes complexes
- Réduit les coûts en automatisant des tâches répétitives, et pourrait même réduire les coûts opérationnels des entreprises de 25 à 35 % d'ici 2025 (BPI)
- Permet donc aux équipes de se concentrer sur des aspects stratégiques. Selon McKinsey, 73% des entreprises ont vu une amélioration de la qualité du travail grâce à l'IA.
- Valorise les compétences humaines (pour 85% des dirigeants selon Accenture)
- Permet aux entreprises d’innover plus rapidement et efficacement
- Constitue une réponse proactive aux besoins changeants du marché et des consommateurs.
Mais derrière toutes ces promesses de changements et d'évolutions se cachent de gros risques. La sur-utilisation de l'IA générative peut entraîner des conséquences imprévues et des défis éthiques, ce qui entraîne une urgence absolue pour les entreprises de prendre en main leur stratégie numérique.
Impact de l’IA générative à l’échelle de l’Homme
L'intérêt des entreprises pour les avancées majeures de l'IA, malgré l'impact environnemental, est inquiétant. Les organisations sont scindées entre un besoin de durabilité et la course à celle qui aura l’IA la plus puissante. L'absence d'incitations financières pour adopter des pratiques écologiques signifie que les entreprises n'abordent pas suffisamment cette question. À cette frontière, on distingue deux catégories d’impact majeurs.
Impacts sur l'environnement : quand l’ambition dépasse les ressources
L'IA générative est gourmande en énergie, un besoin qui pose un gros problème de durabilité. Et la machine ne semble pas freiner ! Dans son rapport 2024, l’Agence internationale de l’énergie prévoit une hausse de la demande énergétique pour l'IA et les cryptomonnaies de plus de 30% d'ici 2026.
Il faut dire que ces outils nécessitent de nombreuses cartes graphiques énergivores et des datacenters qui ont un fort besoin en électricité (souvent issue de sources fossiles) et d'énormes quantités d'eau pour le refroidissement. Les processeurs graphiques (GPU) utilisés pour l'IA consomment quatre fois plus d'énergie que ceux utilisés pour les applications cloud traditionnelles. Dans les faits, l'IA pourrait même bientôt consommer autant d'électricité que l'Irlande ! Pour preuve : une étude de l'Université de Californie montre que l'entraînement de ChatGPT 3 aurait nécessité 5,4 millions de litres d'eau, avec chaque conversation ajoutant 50 centilitres.
Pour ce qui est des émissions de CO2, la plupart des IA produisent entre 1 et 20 tonnes, juste pour leur entrainement. Pour OpenAI, avec 100 millions d'utilisateurs par semaine, ce chiffre monte à 552 tonnes avec ChatGPT 3, soit l’équivalent des émissions annuelles de 55 personnes en France.
Humain et robot, de l’écran au conflit
L'IA générative n'est pas seulement utile pour les chatbots ou la création de texte. Elle impacte une grande partie des tâches intellectuelles réalisées par les humains dans les entreprises, touchant des secteurs comme la création de contenu, la recherche d'informations, et même l'art.
Le sujet est devenu complexe et a émergé sur le marché "du jour au lendemain". Il y a un besoin croissant de formation pour les salariés, car les entreprises exigent d'être constamment informées et à jour sur le sujet. Malheureusement, ce besoin accru de connaissances pourrait approfondir le fossé de l'illectronisme et risquer d'exacerber les inégalités sociales.
En outre, les préoccupations éthiques liées à la création de contenu automatisée et les déséquilibres économiques et sociaux potentiels dus à l'omniprésence de l'IA générative sont de plus en plus présents. Il y a aussi un risque de désinformation à grande échelle, car l'IA générative pourrait nous entraîner dans une ère post-vérité, posant des risques réels pour les organisations, les entreprises et les gouvernements.
La plupart des tâches intellectuelles dans toute organisation actuellement effectuées par des humains seront finalement impactées, bien au-delà de tâches comme la création de contenu que nous observons aujourd’hui. Cela offre d’immenses opportunités pour transformer la productivité des cols blancs pour les organisations qui peuvent l’exploiter. Cependant, cela soulève également des questions cruciales sur la responsabilité environnementale et sociale. Concilier l'IA générative avec une stratégie numérique responsable constitue un défi majeur pour notre société, car une nouvelle civilisation ne peut être envisagée pleinement que si elle est durable pour notre planète.
Comment concilier IA et stratégie de sobriété numérique ?
Alors que l’innovation technologique a des difficultés à rimer avec préservation des ressources de notre planète, les entreprises sont appelées à concilier intelligence artificielle et stratégie de sobriété numérique. Cette intégration est non seulement cruciale pour répondre aux impératifs environnementaux actuels, mais aussi pour se prémunir contre les futures lois et réglementations qui viendront ajuster le cadre de l’IA dans le futur. Ainsi, pour concilier les deux sujets, les entreprises doivent adopter une approche proactive et responsable.
Optimiser les algorithmes
En développant et en employant des algorithmes plus efficaces et moins gourmands en ressources, il est possible de réduire la consommation énergétique de l'IA générative. Des investissements dans la recherche et le développement de techniques d'optimisation sont impératifs, et pourraient permettre aux entreprises de minimiser l'empreinte environnementale de leurs applications d'IA.
Utiliser des sources d'énergie renouvelable
Ici, on parle bien de repenser l'utilisation de sources d'énergie en se tournant vers le renouvelable, telles que l'énergie solaire, éolienne ou hydraulique pour alimenter les datacenters et les infrastructures informatiques utilisées pour l'IA générative. Un moyen durable afin de permettre aux entreprises de réduire leur impact environnemental et contribuer à la transition vers une économie plus durable.
Recycler et réutiliser des composants
La promotion du recyclage ainsi que de la réutilisation des composants électroniques et des infrastructures informatiques est une alternative afin de réduire la consommation de ressources naturelles nécessaires à la fabrication de nouveaux équipements.
Sensibiliser
Un enjeu majeur est de sensibiliser les développeurs, les entreprises et le grand public aux enjeux environnementaux liés au sujet. En fournissant une formation et des ressources sur les bonnes pratiques en matière de développement durable, les entreprises peuvent encourager l'adoption de solutions éco-responsables et favoriser une utilisation éthique de la technologie.
La montée en puissance de l'intelligence artificielle offre aux géants de la technologie et à d'autres industries une puissance phénoménale et presque incommensurable, souvent en décalage flagrant avec leurs convictions écologiques. Cette contradiction souligne la nécessité d'une prise de conscience plus profonde des enjeux liés à notre dépendance à ces technologies. Cependant, dans cette course à la domination technologique, il n'y aura pas de ralentissement, encore moins d’arrêt, tant qu'une sensibilisation généralisée à ces problèmes n'est pas réalisée et que des mesures concrètes ne sont pas mises en œuvre pour réguler cette consommation de ressources. Et c'est le rôle des régulateurs que d’assumer les responsabilités en instaurant un cadre législatif autour de la création et de l'utilisation des IA génératives.